Va plus loin
Au lieu de créer un blogue comme je l’ai fait quelques années après avoir pris ma retraite il y a bientôt six ans, j’aurais pu, pour méditer et réfléchir, m’en aller marcher, seul, le sac au dos, sur le long et étroit sentier qui mène à Saint-Jacques-de-Compostelle. Parce que ce blogue, voyez-vous, je le voyais comme un pèlerinage ou une thérapie. Je voulais refaire à l’envers le chemin qui m’a conduit où je suis maintenant pour mieux me comprendre, et pour mieux savoir d’où je viens et où je m’en vais.
J’ai retracé ma généalogie. J’ai parlé de mes parents et de la relation que j’ai eue avec eux. J’ai partagé des histoires de famille qu’on se transmet de génération en génération. J’ai raconté des épisodes cocasses, d’autres tragiques. Dans un texte, j’ai même imaginé une interview entre un chroniqueur de l’époque et mon ancêtre Pierre-Alain Bugeaud avant son départ du port de La Rochelle pour la Nouvelle-France.
J’ai tenté de faire des liens entre les événements marquants de ma vie, les personnes que j’ai connues qui ont eu une influence sur moi, les lectures qui ont orienté mes pensées, la poésie et la musique qui m’ont aidé à vivre et qui m’ont fait rêver. J’ai parlé de mes succès, de mes échecs et de mes rêves déçus. J’ai aussi parlé de hasard et de destin, de politique, de justice, de langue et de religion. J’ai parlé d’amitié, de l’amour que je croyais perdu à tout jamais et de l’amour retrouvé, encore plus beau et plus fort qu’avant.
Et tout cela m’a aidé, vous ne pouvez pas vous imaginer à quel point, à atteindre l’objectif que je m’étais fixé au départ. Je me suis rendu compte qu’en comparaison avec ce que plusieurs ont accompli au cours de leur existence, quelquefois très brève, j’étais somme toute un être plutôt médiocre, autant dans mes qualités que dans mes défauts. Mais j’ai retrouvé malgré tout une plus grande sérénité et une plus grande compassion pour moi-même.
Et puis, il y a quelque temps, lorsque j’ai cessé d’être inspiré à écrire de nouveaux textes, je me suis dit que j’avais probablement fini de dire ce que j’avais à dire, et que le temps était peut-être venu de passer à autre chose. Je me disais que quand on fait le pèlerinage de Compostelle et qu’on arrive au bout du chemin, on reprend l’avion, on rentre chez soi et c’est fini. Et je me disais aussi que c’était la même chose pour une psychothérapie. Sauf si notre thérapeute la prolonge indéfiniment pour continuer à être payé, il arrive un moment où elle doit prendre fin. Je me disais que ces quelques idées et réflexions constitueraient l'essentiel de ce que j'allais écrire dans ce qui allait être le dernier article que j’allais publier dans mon blogue.
J’en étais là dans mes pensées lorsque mon ami André, celui-là même qui m’a suggéré de créer ce blogue, m’envoie un courriel avec un lien pour une chanson qui parle d’un gars qui a la nostalgie de la mer et des grands espaces. La chanson me fait penser à une histoire de famille que je raconte brièvement à André qui me suggère d’écrire un texte pour partager cette histoire. J’ai donc écrit ce qui est arrivé à un cousin de mon grand-père que je n’ai pas vraiment connu mais dont j’ai entendu parler par mes tantes. Ça m’a redonné le goût d’écrire, que je n’avais pas vraiment perdu, et ça m'a fait me dire que pour ce qui est de l'inspiration, tout ce dont j'avais besoin, c'était un petit coup de pouce.
Ce soir, je suis retourné au texte que j’avais l’intention d’écrire avant de recevoir le courriel d’André et je vois les choses autrement. Je me dis que ce n’est pas parce qu’on est rendu à Compostelle que le voyage est terminé. On laisse derrière soi ses bottes usées, son sac à dos et son bâton de pèlerin, mais on continue à cheminer dans son cœur, dans son imagination et dans ses pensées. C’est la même chose pour une psychothérapie. C’est souvent beaucoup plus un commencement qu’une fin. On repart avec une vision plus claire de soi-même et de la vie.
À la suite de cette réflexion, une chanson me revient en mémoire, une chanson que j’écoutais quand j’avais vingt ans avec mes parents. Elle nous dit que même si l’on se croit arriver, le voyage ne fait que commencer. Cinquante ans plus tard, je me rends compte que c’est encore vrai. Ce n’est pas parce que j’aurai bientôt soixante-dix ans que je ne n’ai plus rien à découvrir. Je n’ai découvert qu’une infime parcelle de l’infinité et de la profondeur de l’amitié et de l’amour. Et puis, comme dit la chanson : « Il y a la lumière tout au bout du chemin. » Mais pour voir la voir, cette lumière, il fait vraiment aller jusqu’au bout de son chemin.
Voici la chanson. Elle est chantée par John Littleton.
https://www.youtube.com/watch?v=JMRaQkgL-aE
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