Le piège de la reconnaissance
"La reconnaissance est un cadeau quand on la reçoit, mais un piège quand on la cherche."
Selon le dictionnaire, la reconnaissance est le sentiment qui incite à se considérer comme redevable envers la personne de qui on a reçu un bienfait. Dans ce sens-là, la reconnaissance est synonyme de gratitude. Même si Jésus a dit que la main gauche ne devait pas savoir ce que faisait la main droite, je crois que la plupart des humains s'attendent à ce que le bien qu'ils font soit connu et reconnu et à recevoir de la gratitude en échange.
Dans un autre contexte, le mot peut être synonyme d’appréciation pris au sens large. Un gars peut recevoir une marque de reconnaissance pour un talent qu’il a ou pour quelque chose qu’il a accompli sans qu’il soit question d'un bienfait ou d'un acte de générosité de sa part. On lui donnera une médaille, ou bien on écrira un article en ligne ou dans les journaux pour reconnaître son talent et ce qu’il a accompli. L’Académie suédoise a reconnu le talent et l’œuvre d’Annie Ernaux en lui décernant le prix Nobel de littérature en 2022.
Quand elle arrive sans qu'on s'y attende, elle est un véritable cadeau ; mais le problème pour nous, les humains, c’est que la reconnaissance provoque une sensation tellement agréable qu’on peut très facilement s’y habituer et en devenir dépendant comme s’il s’agissait d’une drogue.
Une amie de ma femme qui occupait un emploi bien payé aux États-Unis comblait d’argent et de cadeaux les membres de sa famille et ses amis quand elle retournait en vacances au Vietnam. Elle leur envoyait aussi des cadeaux par la poste. Plus les cadeaux étaient chers, plus grandes étaient les marques de reconnaissance et d’affection qu’elle recevait. On la louangeait et on lui disait qu’elle était une sainte. Et elle, elle travaillait de plus en plus fort pour acheter des cadeaux de plus en plus chers et recevoir de plus en plus de reconnaissance. Un jour, elle a perdu son emploi et sa santé : finis l'argent et les cadeaux...et finie la reconnaissance.
Un gars que je connais est toujours en train de chercher quelque chose qui le distinguera et suscitera l’admiration des autres. Il passe d’une activité à une autre et d’un projet à l’autre, pas nécessairement parce que ça l’intéresse, mais parce qu’il a besoin de reconnaissance et d’attention. À le regarder aller, on pourrait croire qu’il est passionné par ce qu’il fait ; mais non, ses passions lui viennent de la reconnaissance et de l'admiration qu’il retire de ce qu’il fait.
Le prix de la reconnaissance, c’est quand ce qu’on fait pour l’obtenir devient une obsession qui nous empêche de penser clairement et de prendre du recul par rapport à qui on est et ce qu’on fait. Pour revenir à Jésus, il a aussi dit que si que si on fait le bien uniquement pour obtenir de la reconnaissance, on a déjà obtenu notre récompense.
Le piège dont parle l’auteur de la citation qui m’a inspiré ce texte, Serge Marquis, c’est selon moi quand la recherche de la reconnaissance nous fait perdre de vue l’essentiel.
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