Les rêveries du retraité solitaire

Les rêveries du retraité solitaire

Un message d'espoir

Une réunion des A. A. (Alcooliques Anonymes) débute toujours de la même façon (la lecture des étapes et des traditions) et se termine toujours de la même façon (la prière). Au milieu, il y a le plat de résistance : le témoignage d'un membre qui nous parle de ses déboires avec l'alcool, et qui nous raconte comment il s'en est sorti. C'est la personne désignée pour diriger la réunion pendant un mois qui choisit qui sera invité à venir partager. Personne n'est payé pour le faire. On le fait par solidarité.

 

Plusieurs membres des A. A. ont développé un talent, qu'ils avaient probablement déjà sans le savoir, pour raconter. Ils sont passés maîtres dans l'art de pratiquer l'autodérision et ils peuvent rendre comiques les situations les plus tragiques, juste par leur façon de les décrire. Ils sont devenus des orateurs talentueux qui savent moduler leur voix et qui savent aussi quand faire des pauses pour créer le maximum d'effet. Ils peuvent, comme on dit, nous faire passer par toute la gamme des émotions. Ils utilisent des gestes pour appuyer leurs propos, en laissant leur regard planer au fond de la salle ou s'attarder pendant quelques secondes sur une seule personne.

 

Pour ma part, je n'ai partagé qu'une seule fois et j'ai trouvé ça très pénible. J'avais à cette époque-là des crises de panique. Quand ça arrivait, j'avais des étourdissements et de la difficulté à respirer, surtout quand j'étais dans un endroit public. J'ai souvent cru que je faisais une crise cardiaque et que j'étais en train de mourir.

 

C'est sans doute pour cette raison que j'ai pu m'identifier à cet homme que j'ai entendu partager il y a un peu plus d'un quart de siècle. Je ne peux pas vous le décrire parce que j'ai oublié de quoi il avait l'air. Tout ce dont je me souviens, c'est que ses mains et sa voix tremblaient, et qu'il semblait avoir de la difficulté à respirer. Je suis certain qu'il aurait préféré ne pas être là. En l'écoutant parler, j'ai pensé au Christ sur sa croix. Je me sentais mal pour lui parce que je savais un peu ce qu'il vivait.

 

Après avoir fini de nous raconter son histoire, il a répété les paroles d'usage qu'il avait si souvent entendues prononcer par d'autres : « S'il y a un nouveau ou une nouvelle dans la salle ce soir, je veux te dire que tu n'es pas seul et qu'il y a de l'espoir. Si tu es déjà venu et que tu es reparti, et que tu as décidé de revenir, je te dis que nous serons toujours là pour toi, et que tant que tu seras en vie, il y aura toujours de l'espoir. »

 

Il se passe quelquefois des choses merveilleuses dans le sous-sol rempli de fumée d'une église : des hommes et des femmes qui avaient cessé d'espérer retrouvent l'espoir et le goût de vivre; elles étaient arrivées la tête basse et le cœur lourd et repartent la tête haute et le cœur plus léger. 

 



26/01/2019
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