Les rêveries du retraité solitaire

Les rêveries du retraité solitaire

Le ministère de la Solitude

C’est le nom du nouveau ministère que le gouvernement britannique a créé pour contrer les problèmes liés à la solitude. J’ai entendu ça à la radio en allant faire du ski de fond ce matin. Les deux animateurs ont parlé des personnes de plus en plus nombreuses qui vivent seules dans nos sociétés occidentales et des problèmes de santé et socio-économique que cela engendre. Ils ont dit que le fait de vivre seul après l’âge de 65 ans équivaudrait, pour ce qui est des risques à la santé, à fumer quinze cigarettes par jour, à consommer six boisson alcoolisées, et à être obèse et sédentaire. Ils ont aussi dit que les personnes seules étaient plus sujettes à développer des problèmes de démence en vieillissant. Ils ont donné des chiffres intéressants concernant le Québec : Il y a maintenant 18% de la population qui vit seul comparativement à 9% en 1981. 

 

En revenant de faire du ski, j’ai raconté ça à Maria. Elle m’a dit qu’il y a quatre familles qui habitent dans la maison où elle est née au Vietnam, que son frère aîné vit sous le même toit que quatre de ses filles avec leurs maris et leurs enfants, et qu’il y a six familles qui partagent la maison de son oncle. Quelle différence ! 

 

Pour moi qui ai toujours vécu seul ou en couple depuis que je suis arrivé à l’âge adulte, je ne peux pas m’imaginer partager une maison avec deux ou trois autres familles. Et pourtant, la pensée que je pourrais finir ma vie complètement seul me terrorise. Je crois que le besoin de solitude varie beaucoup d’un individu à l’autre et qu’il y a des personnes qui sont naturellement plus ou moins grégaires que d’autres. 

 

Dans les sociétés traditionnelles en voie de développement, les gens n’ont pas le choix. Ils s’habituent à partir d’un jeune âge à vivre entourés de plusieurs personnes de différentes générations. Je me souviens que Maria m’a aussi dit que quand les Vietnamiens vont à la plage, ils ne cherchent pas, comme nous, un petit coin tranquille à l’écart de la foule, mais qu’ils s’installent là où il y a le plus de monde. C’est comme si leur façon de vivre les avait conditionnés à cela. 

 

Pour nous, en Occident, le fait qu’un partie de plus importante de la population vive seule est relativement nouveau. Au Québec, ce phénomène a commencé timidement avec la Révolution Tranquille il y a une soixantaine d’années. C’est maintenant devenu impossible de retourner en arrière, et nous n'avions pas pu prévoir les problèmes que ce changement allait entraîner. Peut-être avons-nous, nous aussi, au Canada et au Québec, besoin d’un ministère de la Solitude.

 

 

Si nous avions, ici au Canada ou au Québec, un ministère de la Solitude, il y aurait  forcément un ministre de la Solitude. Voici comment j’ai imaginé de quoi il aurait l’air et quel serait son rôle au sein du gouvernement :

 

Il traîne d’un pas hésitant et mal assuré son vieux corps osseux et décharné, vêtu de son costume gris trop grand et usé, de la même couleur que ses cheveux rares et clairsemés, dans les longs couloirs du Parlement sombres et mal éclairés. Il longe les murs comme une ombre et l’écho de sa canne martelant les tuiles de granite annoncent son arrivée et le suivent longtemps après qu’il est passé.
Il est toujours assis seul et en retrait de l’Assemblée, le teint blafard et le regard perdu dans ses pensées et dans son passé. Il ne parle à personne et personne ne lui adresse la parole. Il ne pose aucune question et ne prononce aucun discours. Il n’a pas été élu et ne représente aucun comté. Son unique fonction est de rappeler aux députés qu’il y a dans leur pays de plus en plus de personnes comme lui, seules et abandonnées, et qu’il ne faut pas les oublier. C'est le ministre de la Solitude.

 

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20/12/2018
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