Les rêveries du retraité solitaire

Les 75 tours

Quand j’étais enfant en Gaspésie, il y avait chez mes grands-parents un tourne-disque et plusieurs disques 75 tours soigneusement rangés dans des albums en carton que l'on sortait lentement en prenant soin de ne pas toucher la surface mais uniquement le coutour du disque. Je ne me souviens pas beaucoup de ces disques, mais je me souviens qu'il y avait Mario Lanza et Nat King Cole. Ma grand-mère aimait beaucoup quand Mario Lanza chantait l’Ave Maria de Schubert. Mes oncles et mes tantes écoutaient souvent Nat King Cole qui chantait Unforgettable et d’autres chansons romantiques. Il y avait aussi des disques avec des chansons en français. C'étaient des chanteuses qui chantaient avec des drôles de voix en faisant rouler exagérément les "r".

Les 45 tours

Mon cousin Yvon avait beaucoup de 45 tours, surtout des chansons d’Elvis Presley. Pour écouter ses disques, il avait ce qu’on appelait un pick up au sous-sol de sa maison à Jonquière. Yvon utilisait du Brylcreem et se peignait les cheveux par en arrière comme Elvis. Il avait tous les hits d’Elvis comme Blue Suede Shoes, Jailhouse Rock et plein d’autres. Yvon portait un blouson de cuir, des jeans bleu pâle et des bottillons en cuir noir avec des fers sous les talons. Son portefeuille dépassait de la poche arrière de son pantalon et était relié à sa ceinture par une chaîne en métal. Dans l’autre poche, il y avait un peigne qui dépassait. Yvon mâchait de la gomme en marchant. Il avait fière allure, mon cousin. Moi, je ne me souviens pas d’avoir acheté un seul disque 45 tours. Je n’avais pas d’argent pour ça. De toute façon, je pouvais écouter Elvis chez mon cousin Yvon.

Les 33 tours

On appelait ça aussi des albums ou des microsillons. Ça, j’en ai acheté plusieurs. Les 33 tours couvrent plusieurs décennies de ma vie : des chansonniers et chanteurs québécois et français, de Robert Charlebois à Léo Ferré en passant par Vigneault, Brel, Moustaki et Félix Leclerc quand j’étais étudiant ; plus tard, ce sera du blue grass et de la musique cajun après mon séjour en Louisiane et des chansons et musiques irlandaises après mon voyage en Irlande. Maintenant que j’y pense, j’ai acheté il y a très longtemps l’album Sergeant Pepper des Beatles et un microsillon de Jimmy Hendrix. Petit détail technique : on pouvait faire jouer des disques 45 tours sur un tourne-disque conçu pour des 33 tours. Il suffisait d’avoir un adaptateur. Un adaptateur, c’était un machin rond en plastique, la plupart du temps jaune, qu’on mettait dans le grand trou au milieu des 45 tours pour le rendre plus petit.

Les 8 pistes

Vous souvenez-vous des 8 pistes ? Ça n’a pas duré longtemps. Ça n'a été utilisé que pendant quelques années. C'était gros et encombrant et il n'y avait que quelques chansons sur chaque cartouche, je crois qu'on appelait ça. Je me souviens d’une cartouche 8 pistes de Johnny Cash que j’avais achetée, l’une des seules, et que j’écoutais en cruisant dans le comté Pontiac dans la Pontiac Laurantian de mon père. C'était un peu après que j’ai commencé à conduire. J’écoutais I Walk the Line et Folsom Prison Blues.

Les cassettes

Ça, j’en ai acheté beaucoup et de tous les genres : de la musique classique, de la musique pour danser, des chansons corses, Cesaria Evora, de la musique de relaxation et de détente, des chansons religieuses, etc. Et puis un jour je me suis rendu compte que je pouvais faire ce qu’on appelle maintenant des playlists à partir de mes albums 33 tours. C’était un travail long et fastidieux, mais je pouvais mettre sur une même cassette uniquement les chansons que j’aimais et dans l’ordre que je voulais. Les cassettes, ça correspond à la période des Walkman Sony. J’avais des cassettes que j’écoutais uniquement sur mon Walkman en courant ou en faisant du ski de fond pour me donner de l’énergie. Je me souviens d’une chanson de ZZ Top qui s’appelait Legs. Aujourd'hui,

Les iPod

J’ai utilisé mon iPod pendant seulement quelques années, exclusivement pour courir ou pour faire du ski de fond. Maintenant, je ne fais plus de course à pied ; et quand je fais du ski de fond, je préfère écouter la neige tomber sur les branches des arbres que de me défoncer les tympans avec de la musique stimulante et entraînante en croyant que ça va me faire aller plus vite.

Les CD

Nous avons beaucoup de CD que nous écoutons presque seulement dans la voiture.  À la maison ou au chalet, nous demandons à Google Home ce que nous avons le goût d’entendre. J’ai acheté beaucoup de CD de différents genres de musiques et de chansons. La plus grande partie de mes CD sont des compilations que j’ai faites à partir de musique que j’ai trouvée en ligne. Les CD sont encore très présents dans ma vie mais pas autant qu’avant.

Les tablettes et les ordinateurs

En utilisant ma tablette ou mon ordinateur, j’ai retrouvé des chansons et de la musique que j’ai écoutées à différentes périodes de ma vie. J’ai aussi découvert des chansons que je ne connaissais pas de chanteurs et de chanteuses que je croyais bien connaître. Moi qui ai écouté Brel pendant des années, je ne connaissais pas sa chanson Voir un ami pleurer. Je ne connaiasais pas non plus Tu penses à quoi? de Léo Ferré. C’est incroyable tout ce que J’ai découvert et redécouvert en ligne. Vive la technologie !

Google Home

On peut demander à Google Home à peu près n’importe quoi : des chansons en vietnamien des années 1960, de la musique religieuse tibétaine, de chansons en roumain, en hébreu ou en catalan, etc. Il n’y a aucune limite. Avant de commencer à écrire ce texte, j’avais demandé à Google Home de me faire entendre des chansons rockabilly, du vieux rock des années 1950 et 1960 écouté par des jeunes qui en ont fait un style de vie avec la coiffure, les vêtements et tout le kit. Maria est au Vietnam et je suis seul avec les chats pour un mois. Ce genre de musique me donne de l’entrain et me rend de bonne humeur. Je fais quelques pas de danse de la cuisine au salon et je me retrouve à 12 ans avec mon cousin Yvon quand nous écoutions Elvis sur ses disques 45 tours.