Les rêveries du retraité solitaire

Nous utilisons fréquemment l’expression « dialogue intérieur » pour désigner les échanges et la communication que nous avons constamment avec la petite voix à l’intérieur de nous.

Au sujet de cette petite voix, Émilie De Tournay-Jetté, une psychologue à l’Institut universitaire de santé mentale de Montréal, a écrit : « Notre petite voix nous aide à nous construire comme personne, à organiser notre pensée, à devenir plus structuré et à mieux planifier des choses. Elle est très utile tout au long de notre vie. »

Et Hélène Lœvenbruck, chercheuse en neurolinguistique au Laboratoire de psychologie et neurocognition, CNRS, Université Grenoble Alpes a écrit ceci : « On a deux grands modes de parole intérieure : une qui est délibérée, du type " il faut que je fasse ma liste de courses ", et l’autre qui est le vagabondage mental verbal, plus spontané, qui survient à n'importe quel moment. »

Je peux m’identifier à ces deux citations. J’ai toujours eu ce dialogue intérieur entre ce qui me semble être deux parties de moi-même. Ça m’aide à prendre des décisions et à mieux me situer par rapport à plusieurs choses, que ce soit au niveau matériel ou au niveau spirituel.

Pour moi, ça se passe un peu comme ceci. Je suis, par exemple, en train de faire du kayak ou du ski de fond, et je me demande ce que je ferai immédiatement après, ou si, en dialoguant avec moi-même pour peser le pour et le contre, nous devrions aller en vacances à Cuba ou au Mexique. Il y a aussi le « vagabondage mental verbal, plus spontané, qui survient à n’importe quel moment », dont parle Hélène Lœvenbruck. Pour moi, ce dialogue ne se fait de la même façon que l’autre. Il se fait beaucoup plus avec des pensées qu’avec des paroles. Par exemple, je pense tout à coup à quelque chose que j’ai entendu ou que j’ai lu qui remet en question ou qui vient  bouleverser ce que je pensais ou croyais déjà. Il s’ensuit un dialogue intérieur pour tenter de rétablir l’équilibre.

Ça fait 72 ans que je vis avec avec la même petite voix, et je peux dire qu’avec le temps, j’ai appris à bien la connaître…à trop bien la connaître. Je dois dire aussi qu’elle me tape quelquefois un peu sur les nerfs, cette petite voix. Je l'entends venir avec ses gros sabots. C'est un peu comme quand on sait exactement ce que va nous dire la personne avec qui l'on vit depuis plusieurs années et qui sait exactement comment nous réagissons et comment nous pensons.

Si je tentais de définir ce qu'est cette petite voix, je dirais que c’est un mélange d’expériences, de convictions, d’émotions, d'intuition et de raison.