Les rêveries du retraité solitaire

Le soir, quand je fais du kayak avec Maria, lorsque le soleil se couche doucement sur la rivière et que le ciel devient toutes sortes de couleurs, elle chante toujours : en vietnamien, en anglais et en français. Avant-hier soir, elle s’est mise à chanter des chansons de son enfance en vietnamien, des berceuses. Elle m’a demandé si je me souvenais des chansons de mon enfance. J’ai pensé aux chansons que nous écoutions sur le tourne-disque de ma tante Martha : Cadet Rousselle qui avait trois maisons, le roi Dagobert qui avait mis sa culotte à l’envers, la casquette du père Bugeaud qui volait sous les drapeaux, Frère Jacques, Mon ami Pierrot.

Et puis il y a une chanson qui m’est revenue comme un écho lointain de mon enfance. C’est une chanson en indien. Même si je ne comprends pas les paroles, je n’ai pas oublié les mots de cette chanson. Je ne me souviens pas comment et par qui je l’ai apprise. En revenant de faire du kayak, j’ai retrouvé cette chanson sur YouTube. C’est une berceuse iroquoise. En l’écoutant, il m’est revenu un tas de souvenirs : l’air salé de la mer qui se mélangeait au parfum des fleurs de ma grand-mère, la senteur du tabac à pipe de mon grand-père, les cloches de l’église, la sirène et la senteur du moulin, le goût des framboises mélangées avec de la crème fraîche. Il y a aussi les voix lointaines des cousins de mes grands-parents qui jasaient dans la cuisine : l’accent acadien de Jean-Paul Arsenault et l’accent anglais des Ferguson et de Pete Furlong.

J’ai trouvé deux versions de cette chanson sur YouTube : la première est comme nous la chantions quand j’étais enfant. Elle est plus lente. La deuxième est un peu plus vite. Je ne sais pas pourquoi mais il y a pour moi comme un fond de tristesse et de nostalgie dans cette chanson. C'est le souvenir des choses qu'on a vécues et qui ne reviendront plus.

https://www.youtube.com/watch?v=NXY04gRDEO4

https://www.youtube.com/watch?v=K-3K7nXm-CQ