Le temps qu’il nous reste
J’aurai 73 ans dans deux jours. Je pense que rendus à cet âge-là, plusieurs comme moi se demandent quelle est la meilleure façon de passer le temps qu’il leur reste à vivre. Parce qu’on l’a déjà entendu dire par d’autres qui avaient l’air de savoir de quoi ils parlaient, on se dit que pour bien vieillir, il faut profiter au maximum du moment présent. Autrement dit, il faudrait, comme l’enseignent les moines bouddhistes, essayer de vivre, pas seulement sa vieillesse, mais aussi toutes les autres étapes de sa vie, uniquement dans le ici et maintenant. Mais honnêtement, qui arrive à faire ça tout le temps ?
Dans la réalité de nos vies de tous les jours, qu’on le veuille ou non, notre cerveau fonctionne comme un ordinateur avec plusieurs applications ou programmes ouverts en même temps, et c'est comme si l'on passait continuellement de l'un à l'autre sans l'avoir décidé ou choisi. On se demande par exemple si l’on devrait se préparer ou non une autre tasse de café en sachant qu’on en a déjà bu trois. L’instant d’après, on se dit qu’il ne faudra pas oublier d’aller au magasin pour acheter de la nourriture pour les chats. En pensant aux chats, on se dit qu’on ne sera probablement pas là jusqu’à la fin de la vie du petit chat qu’on vient d’adopter et qu’il y a de bonnes chances que l’on meure avant lui. Et là, on s’inquiète : qui prendra soin de notre chat quand il sera devenu vieux et qu’on ne sera plus là pour s'occuper de lui. Et ça nous amène à penser à notre propre mort : comment ça va se passer, si on va beaucoup souffrir, et si on sera le premier à partir.
C’est à ce moment-là que l’on aperçoit par la fenêtre un geai bleu se poser sur la branche d’un arbre. On se dit que c'est le moment de mettre en pratique ce qu’on nous a enseigné au sujet du bonheur et de la nécessité de vivre dans l’instant présent. Il faut cesser immédiatement de penser à toutes les autres choses qu’on a dans la tête et se concentrer uniquement sur l’oiseau. On se concentre sur les couleurs et les mouvements de l’oiseau pendant quelques secondes. L’oiseau s’envole et l’on se remet à penser à notre tasse de café.
Une autre façon de bien profiter de temps qu’il nous reste à vivre serait de faire le bilan et de mettre de l’ordre dans tout ce que nous avons retenu et appris de nos expériences, de nos succès et de nos échecs, de tout ce qu’on nous a enseigné, de ce que nous avons vécu, de ce dont nous avons été témoins, de ce que nous avons lu et entendu, de nos souvenirs, de nos joies et de nos peines, etc., et de tirer des enseignements et des leçons de tout ça.
C’est un peu ce que je m’étais proposé de faire en écrivant les articles que je publie dans mon blogue. Mais en faisant cet exercice, j’ai fini par me rendre compte, un peu comme dans la chanson de Jean Gabin, que rendu à l’automne de sa vie, on en sait moins que ce que l’on croyait savoir quand on avait 18 ans ou 25 ans, et qu’au fond on n’avait pas appris grand-chose.
https://www.youtube.com/watch?v=OEkJ45ZXK-o
« On oublie tant de soirs de tristesse mais jamais un matin de tendresse. » Le temps qu’il nous reste à vivre, comme le reste de nos vies, sera fait de moments d’angoisse et de tristesse mais aussi de réconfort et de tendresse.
Je crois que la vie restera jusqu’à la fin un mystère et que l’on partira avec très peu de réponses et de certitudes.
Ça me fait penser à ce court extrait d'une autre chanson. Celle-là, elle est de Jean Ferrat « Je meurs d’une petite fièvre avec un prénom sur les lèvres et quelques souvenirs heureux quelque part au fond des yeux. »
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