Le dire ou l’écrire
Je ne suis pas une grande gueule. Je n’aurais pas fait un bon politicien ou un bon vendeur. Je n’ai pas le don de la parole. Je n’ai pas ce que les Irlandais appellent « the gift on the gab. » J’ai besoin de trop de temps pour penser à ce que je vais dire et à comment je vais le dire pour participer activement et spontanément à des discussions. Je me souviens qu’au cours des réunions que nous avions au travail, quand j’avais finalement trouvé quelque chose que je croyais intéressant et pertinent à dire, et après avoir déterminé ce que je croyais être la meilleure façon de le dire, on avait déjà passé à un autre sujet.
Je suis beaucoup plus à l’aise de m’exprimer à l’écrit qu’à l’oral. La communication orale va souvent trop vite pour moi. Je n’arrive pas suivre. Je crois que c’est dans ma nature. Je suis plutôt introverti. J’admire les gens qui peuvent s’exprimer aussi bien à l’oral qu’à l’écrit. Je pense à Gilles Vigneault qui écrivait des textes magnifiques, autant en poésie qu’en prose, et qui pouvait aussi raconter des histoires captivantes. Il pouvait également participer à des échanges et discussions sur la politique et les enjeux sociaux sans perdre le fil de ses idées. Sur YouTube, il y a des entrevues avec des écrivains, très souvent des Français, qui viennent nous parler du dernier livre qu’ils ont écrit sur la politique, l’économie ou les problèmes du monde. En une heure, ils arrivent à nous dire presque tout ce qu’ils ont écrit dans leur livre. Ils parlent, parlent et parlent, et ça coule comme l’eau d’une rivière au printemps. Les idées s’enchaînent avec fluidité et de façon logique. Pour moi, c’est comme regarder un gymnaste aux Olympiques.
Écrire et publier ce que j’écris sur mon blogue est selon moi une bonne façon de mesurer l’impact que je peux avoir sur les personnes qui sont proches de moi et d’entrer en contact avec elles. Je lis les commentaires et ça me donne une assez bonne idée d’où mes lecteurs et lectrices se situent par rapport aux idées et aux opinions que j’exprime dans mes textes. À l’oral, la réaction est instantanée et beaucoup plus évidente. On la voit dans les visages et les expressions de ceux et celles avec qui on est en train de dialoguer, et avant même qu’ils aient ouvert la bouche pour réagir à ce qu’on a dit. La communication orale, c’est beaucoup plus vivant et spontané.
En vieillissant, je me rends compte que le peu d’aisance et de facilité que j’ai toujours eu à m’exprimer oralement est en train de diminuer. C’est devenu encore plus laborieux que ça l’était auparavant. Je crois que ceci est causé à la fois par le manque de pratique et par le cerveau qui s’ankylose, comme tout le reste, avec le passage du temps. Ça peut être le bon mot qui ne vient pas, ou bien il vient uniquement en anglais quand je parle français ou uniquement en français quand je parle anglais. C’est aussi, je crois, lié à la voix. Je n’ai jamais eu une voix très forte et elle s’affaiblit en vieillissant.
Alors, le dire ou l’écrire ? Les deux, je crois. Je me dis que je devrais faire un effort pour profiter pleinement des occasions qui s’offrent à moi de communiquer oralement, même si c'est pour moi plus laborieux et que ça demande plus d'efforts, et que je devrais aussi continuer d'écrire pour utiliser mon cerveau d’une façon plus organisée et structurée, une façon qui est pour moi plus naturelle et plaisante.
C’est un peu comme pour le corps : il y a le yoga pour la souplesse, la musculation pour la force et le cardio-vasculaire pour l’endurance. La souplesse ou la force sont plus naturelles pour certains, alors que pour d'autres, c'est l'endurance. Pour créer l'équilibre et l'harmonie, je crois qu'il faut tenir compte de l'ensemble, pas seulement de ce qui est pour nous plus facile ou plus difficile.
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