Ivresse
Au niveau physique, le dictionnaire Robert définit le mot « ivresse » da la façon suivante : « État d'une personne ivre ; intoxication produite par l'alcool et causant des perturbations dans l'adaptation nerveuse et la coordination motrice.» Au sens figuré et pour décrire les effets de l'ivresse sur l’humeur et le cerveau, le dictionnaire Robert la décrit comme un « état d'euphorie ou d'exaltation. »
Je peux dire qu’au cours de ma vie, j’ai expérimenté les effets de l’alcool tant au niveau physique que psychologique. De la légère intoxication jusqu’à la perte totale de conscience, j’ai pu constater ce que l’alcool fait subir au corps humain quand on en abuse. Au niveau des émotions, j’ai aussi vécu cette sensation d’euphorie et d’exaltation que l’on éprouve quand le taux d’alcool atteint un certain niveau que je qualifierais d’idéal. Je me souviens de m’être déjà dit que si je pouvais passer le reste de ma vie dans cet état, ce serait merveilleux. J’avais l’impression de vivre totalement dans le présent, et la douleur que j’ai constamment derrière les yeux s’était comme miraculeusement envolée…avant de réapparaître, décuplée, le lendemain.
L’ivresse n’est pas uniquement causée par l’alcool et les drogues. Cette sensation d’euphorie et d’exaltation, je l’ai également éprouvée lors de ce que l’on pourrait appeler des expériences spirituelles. C’est ce que Leonard Cohen décrit comme l’impression d’être « habité par quelqu’un ou quelque chose » qu’il n’associe à aucune croyance religieuse en particulier. Dans son poème Sensation, écrit alors qu’il était adolescent, Arthur Rimbaud parle de cet « amour infini » qu’il a senti « lui monter dans l’âme » alors qu’il marchait dans un sentier par un soir bleu d’été. J’ai déjà parlé de ça dans d’autres textes, et si j’ai choisi d’en reparler dans celui-ci, c’est parce que ces expériences que j’ai vécues, et qui ressemblent beaucoup à ce que décrivent Cohen et Rimbaud, sont pour moi très précieuses.
Je pourrais aussi parler de l'ivresse qui vient de la richesse et du pouvoir mais je ne saurais pas trop quoi dire. Je n'ai jamais eu de pouvoir et je n'ai jamais cherché à en avoir. Tout comme l'alcool et les autres drogues, la sexualité peut aussi provoguer une forme d'ivresse. Ça, je peux le comprendre parce que, comme la plupart des humains, je l'ai expérimenté. Ce qui est difficile pour moi à concevoir, c'est que la sexualité, qui devrait être la forme la plus élevée d'attention et de tendresse, peut dans certains cas être associée à la recherche du pouvoir et à la violence.
Avec le recul, et sans trop chercher à comprendre comment et pourquoi, je peux tout simplement dire que ces moments d’ivresse que j'ai vécus sont ceux pendant lesquels j’ai été le plus heureux. Est-ce qu’il me sera donné de revivre de telles ivresses avant de mourir ? Pour ce qui est de l’ivresse qui vient de l’alcool, sûrement pas ! Le prix est trop lourd à payer. Ça fait plus de trente ans que je n’ai bu une goutte d’alcool et je n’ai l’intention de recommencer à boire. Pour ce qui est de ce que j’appellerais l’euphorie spirituelle, j’aimerais bien revivre ce genre d’ivresse au moins une fois avant de mourir. Plus on vieillit, plus on est seul ; et le fait de sentir près de nous et en nous une présence réconfortante qui semble nous dire que nous ne serons jamais seuls, est quelque chose de très enivrant.
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 6 autres membres