Fumer un cigare
Derrière la maison, au fond de la cour, il y a mon cabanon. C’est là que je fume quelquefois un cigare. Dans mon cabanon, j’ai un fauteuil coulissant et un pouf qu’un de mes voisins avait mis aux ordures même s’ils étaient encore en très bon état. J’ai aussi quelques souvenirs de Cuba.
Je suis de nature plutôt anxieuse et angoissée. Je pense tout le temps. Quand je m’installe dans mon cabanon pour fumer un cigare, je continue à penser mais à un rythme différent. Mes pensées défilent lentement devant moi comme la fumée de mon cigare. Je peux les observer plus aisément. Fumer un cigare seul dans mon cabanon est pour moi un moment d’arrêt. Très souvent, c’est là que je trouve les idées pour mes textes. C’est très vague au début mais ça s’organise tranquillement dans ma tête. Et quand j’éteins mon cigare, je suis prêt à commencer à écrire.
Je fais beaucoup de choses pour me garder en forme physiquement et mentalement : des activités cardio-vasculaires comme le ski de fond, le vélo et le kayak, de la musculation et du yoga ; et je lis et j’écris malgré la douleur que j’ai toujours dans les yeux. Ce sont des choses qui demandent un effort et de la discipline. Il faut souvent que je me botte le cul pour les faire. Fumer un cigare, c’est différent. Ça ne requiert aucune discipline et aucun effort physique ou mental. Je sais que fumer est quelque chose de nocif pour la santé, et je me sens un peu coupable de le faire. Quand je fume un cigare, c’est comme si je mettais de côté les règles et que je faisais quelque chose uniquement pour le plaisir…un peu comme dans la chanson de La Compagnie Créole C’est bon pour le moral.
C’est très rare que je fume un cigare avec d’autres. Pour moi, être obligé de parler en fumant, ça gâche un peu le plaisir, mais il y a des exceptions, comme en été, au chalet, quand je fume un cigare avec mon voisin Raymond. Raymond ne fume pas mais il sirote lentement une bière pendant que je déguste mon cigare. Nous ne parlons pas tout le temps. Nous restons quelquefois silencieux à regarder les canards sur la rivière ou les nuages passer dans le ciel. Il y a aussi quand je fume un cigare avec mon ami André qui fume une cigarette. On appelle ça nos séances de boucanage. Nois fumons assis dans sa balançoire, et nous parlons de choses et d'autres mais tranquillement...comme si le fait de fumer donnait un rythme différent à nos conversations.
Quand je fume un cigare, je pense quelquefois à mon grand-père qui fumait la pipe, assis dans la balançoire ou dans sa chaise berçante, dans la cuisine, ou sur la galerie de sa maison, en Gaspésie. Il avait l’air heureux et serein. Il avait à peu près le même âge que j’ai maintenant. Et je me dis que soixante ans plus tard, c’est un peu la même chose pour moi avec mon cigare.
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