Les rêveries du retraité solitaire

Il me semble que rien ne peut arrêter le flot de mes pensées. Peu importe ce que je fais, que je sois en train de conduire, de faire du ski de fond ou du kayak, que je sois seul ou avec d’autres, je pense toujours à quelque chose : Qu’est-ce que je vais faire quand j’aurai fini de faire ce que je suis en train de faire ? Est-ce que je devrais faire remettre les pneus d’été sur notre voiture ou attendre encore une semaine au cas où on aurait une autre tempête de neige ? Et il y a les pensées plus angoissantes : Qui de nous deux partira avant l’autre ? Vais-je finir ma vie seul, complètement perdu, dans un endroit que je ne connais pas, où je ne connais personne, et sans savoir qui je suis et ce que je fais là ? Qui va prendre soin de nos chats quand nous ne serons plus là ?

De ce temps-ci, qu’on le veuille ou non, la politique occupe une grande partie de nos pensées. C’est la raison pour laquelle je n’ai rien écrit depuis quelque temps. C’est un sujet dont on parle déjà beaucoup trop, entre nous, dans les médias et sur les réseaux sociaux, mais auquel on peut échapper. Ça prend toute la place et c'est difficile de penser à autre chose. Et ça nous fait nous poser plein de questions : Serons-nous envahis et annexés par notre puissant voisin du sud ? Qu’est-ce qui va arriver de notre système de santé ? Est-ce qu’on va pouvoir préserver notre solidarité, notre langue et notre culture ? Est-ce que cet oppressant climat de haine et de méfiance va durer encore longtemps ? Est-ce que tout ça va éclater comme en Europe à la fin des années 1930 ?

Mais quelquefois ces pensées qui bourdonnent dans ma tête comme un essaim d’abeilles s’arrêtent soudainement pendant quelques instants. C’est ce que j’appelle mes doux moments de répit. C’est comme si je me retrouvais dans un endroit en dehors du temps et de l’espace, où je me sens bien sans penser à rien. Je ne sais pas d’où ça vient mais ça fait du bien de s’arrêter de penser de temps en temps. Ça n’arrive pas souvent et il n’y a rien que je peux faire pour faire que ça arrive plus souvent. En général, ça arrive quand je suis seul dans la nature, quand je conduis ma voiture ou quand notre petit chat noir vient se coucher sur moi et qu'il se met à ronronner. Ces doux moments de répit sont des oasis de paix et de sérénité au milieu du tumulte. Je les accueille comme des cadeaux de la vie. Ils sont comme cette douce et apaisante musique qui vient bercer notre âme.

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